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Rapport « Accessibilité numérique, entre nécessité et opportunité » : les principales recommandations du CNNum

Affaires - Immatériel
07/02/2020
Saisi par Sophie Cluzel, secrétaire d’Etat chargée des Personnes handicapées, et Cédric O, secrétaire d’Etat chargé du Numérique, le Conseil national du numérique (CNNum) a remis son rapport le 5 février 2020 et ce dans la perspective de la Conférence national du handicap (CNH) du 11 février 2020.
Il part du constat selon lequel « à l’heure de la quête du numérique responsable, l’accessibilité numérique constitue une nécessité mais aussi une opportunité pour les acteurs. Une nécessité, tout d’abord, puisque l’accessibilité numérique répond à des obligations sociétale et juridique. En effet, d’une part, cela répond à un réel besoin de la population dans le cadre de la transformation numérique des services publics et privés, pour les millions de personnes en situation de handicap, mais également les personnes âgées, les plus jeunes atteints de myopies etc. D’autre part, il s’agit désormais d’une obligation légale et sanctionnée par la loi. Il est donc urgent pour les acteurs d’établir une stratégie juridique d’accessibilité numérique dans leurs organisations ».

A le suivre, « l’accessibilité numérique constitue également une opportunité, dans la mesure où elle pourrait faire émerger un modèle d’économie et de société numériques responsable. L’économie numérique tout d’abord, à travers la création d’emplois liés à l’accessibilité numérique, ainsi que la recherche et le financement de projets innovants en la matière. La société numérique, ensuite, car la conception de produits et services numériques accessibles permettrait de réaffirmer des valeurs fondamentales, telles que l’inclusion, l’égalité et la non-discrimination ou encore l’écologie et la sobriété numérique ».
Aussi, « entre nécessité et opportunité, l’accessibilité numérique représente ainsi une voie stratégique intéressante pour les organisations - publiques et privées - qui souhaitent développer leurs produits et services numériques de façon responsable. Mais avant tout, il s’agit d’un droit fondamental des citoyens qu’il convient de mettre en oeuvre de façon urgente, dans un contexte actuel d’inaccessibilité numérique de la plupart des servicese.

C’est dans ces conditions que le Conseil national du numérique a estimé nécessaire de publier un rapport visant à faciliter le déploiement de l’accessibilité numérique à travers ses 50 recommandations.

On retiendra qu’il aborde tout d’abord l’accessibilité numérique comme nécessité à travers trois secteurs clés pour l’intégration dans la société, particulièrement concernés par la transformation numérique : l’accès à la citoyenneté, à la culture et au savoir.

Ainsi, sur l’accessibilité des services publics numériques, il propose de rationaliser le pilotage de l’accessibilité numérique des services publics, au sein d’une Délégation Ministérielle de l’Accessibilité Numérique (DMAN) qui assurerait le suivi et la mise en œuvre des obligations d’accessibilité, à travers un pouvoir de sanction ; responsabiliser les acteurs de l’administration, notamment en désignant un délégué à l’accessibilité numérique dans les autorités et organismes publics, en prévoyant des sanctions alternatives non pécuniaires telles qu’une interdiction de publication, ou en érigeant l’accessibilité numérique en condition suspensive d’exécution dans les appels d’offres des marchés publics ; renforcer les droits des usagers vis-à-vis de l’administration, grâce à la mise en place d’une plateforme en ligne de signalement au profit des usagers qui souhaitent signaler les sites non accessibles auprès de la Délégation ministérielle de l’accessibilité numérique (DMAN), ou sur le fondement des actions de groupe étendues aux violations d’obligations d’accessibilité.

Sur l’accessibilité des contenus audiovisuels, il recommande d’améliorer le pilotage de l’accessibilité numérique des contenus audiovisuels, à travers la régulation des sites des services de télévision et médias audiovisuels, et non pas seulement des contenus, et plus généralement de l’ensemble des acteurs de la chaîne de valeur, dont les opérateurs de communications électroniques ; responsabiliser les acteurs de la chaîne de valeur des contenus audiovisuels en harmonisant le régime des sanctions du secteur audiovisuel avec celui des sites publics afin de tendre vers un régime commun de l’accessibilité, ou en incluant les plateformes de partage de vidéos pour certains contenus audiovisuels ; encourager la mise en place de normes d’accessibilité communes pour l’ensemble des supports de contenus audiovisuels.

Concernant l’accessibilité des ressources pédagogiques numériques, il propose d’améliorer la production de ressources pédagogiques numériques accessibles et adaptées par la mise en place d’une agence de l’accessibilité et de l’adaptation du livre numérique ; améliorer l’accessibilité des plateformes pédagogiques au sein des établissements primaires, secondaires et universitaires en précisant les objectifs d’accessibilité numérique directement dans le cahier des charges des environnements numériques de travail (ENT) lors de la passation d’un marché public, mais également du côté des éditeurs ; développer les compétences d’adaptation et de mise en accessibilité des ressources pédagogiques numériques dans l’Éducation nationale et l’Enseignement supérieur, en inscrivant la compétence accessibilité numérique dans les fiches de poste du personnel des services handicap et des services d’appui pédagogique à l’accessibilité numérique.

Le Conseil appréhende ensuite l’accessibilité numérique comme opportunité pour la société et l’économie numériques, en termes d’emplois et de formation, mais aussi d’innovation et de valeurs.

Ainsi sur la formation et l’emploi, il propose de sensibiliser les professionnels du numérique à la réglementation sur l’accessibilité numérique, via la création d’un MOOC de sensibilisation sur le modèle de l’atelier RGPD, une formation en ligne proposée par la CNIL ; intégrer l'accessibilité numérique dans la formation initiale et continue des professionnels du numérique, par exemple en inscrivant des dispositifs de sensibilisation dans les référentiels des formations initiales, y compris aux niveaux les plus élevés de diplôme, afin d’améliorer la prise en compte de l’accessibilité numérique par les équipes dirigeantes des projets numériques ; structurer la filière des métiers de l’accessibilité numérique, notamment en inscrivant l’accessibilité numérique au RNCP selon les quatre profils de métiers identifiés par les auteurs du rapport de l’OPIIEC.

Concernant l’innovation, il recommande d’encourager le développement des startups liées à l’accessibilité numérique, par exemple en érigeant l’accessibilité numérique en priorité stratégique du Conseil de l’innovation ; développer les financements de projets inclusifs sur l’intelligence artificielle et créer à l’échelle nationale et européenne des dispositifs d’accessibilité numérique.

Quant à la culture d’un numérique responsable, il propose de sensibiliser à l’accessibilité numérique dès l’école, à l’université, et tout au long de la vie et confier à une autorité le soin de répandre les bonnes pratiques auprès des organisations, par le biais de guides ou d’ateliers de formations ; concevoir des produits et services numériques responsables, afin de véhiculer les valeurs proclamées par la France et l’Union Européenne : égalité, non-discrimination, vie privée, écologie.

L’objectif poursuivi par ces recommandations est de répondre à la question centrale suivante « comment concevoir des services numériques responsables et inclusifs, au profit de tous les citoyens ? ». A suivre...
Source : Actualités du droit